Cela fait plusieurs semaines que je n’ai rien écrit, emportée par le flow (et le flot) de l’activité de l’agence Court-bouillon. Et de mes coups de foudre culinaires.
Au gré des saisons et des voyages, la cuisine s'est ancrée au cœur de mon existence, nourrissant passionnément chaque instant. Elle tisse les liens de mes rencontres, éveille ma curiosité pour l'histoire — celle avec un grand H, mais surtout pour ces histoires personnelles, celles qui rendent la vie si belle.
Au fil des années, la cuisine est devenue le pivot de mes explorations. Sans les haltes dans les marchés, sans la découverte des épices et des aromates, sans ces moments partagés aux côtés de chefs et, plus affectueusement, avec des mamans — véritables chefs du quotidien pour qui cuisiner est un acte d'amour, de soin et de partage — mes voyages perdraient de leur essence. La vie n’aurait pas la même saveur.
Je suis revenue récemment d’un séjour au Sénégal, un pays que je connais bien, mon deuxième pays de cœur. Chaque visite que j’y ai faite a été unique, reflétant ma propre évolution, m'offrant de nouvelles perspectives sur sa richesse culturelle et culinaire.
J’ai vécu ce dernier séjour sous le prisme des sujets liés à l’alimentation sur lesquels j’ai eu l’occasion de réfléchir au fil des années : les ingrédients fondateurs, les recettes traditionnelles, l’équilibre alimentaire ; la place des protéines animales ; l’importance du repas dans la société ; la cuisine de rue.
Et j’ai été frappée par le potentiel immense qu’offre la cuisine Africaine.
Longtemps reléguée à l’image d’une alimentation grasse, avec moins d’intérêt gustatif que d’autres patrimoines culinaires du monde, elle présente pourtant des caractéristiques, qui j’en suis convaincue vont la faire devenir une source d’inspiration pour les chefs, les créatifs culinaires, du fast food à la gastronomie, de la cantine scolaire à l’évènementiel.
Parce que c’est une cuisine saine, qui fait la part belle aux protéines végétales
Grâce à l’association de céréales, de légumineuses, de légumes et de viande ou poisson en faible quantité. Sous l’ère de la colonisation la consommation de riz a été beaucoup encouragée, au point de faire oublier que des céréales ancestrales ont longtemps constitué le cœur des repas : mil, sorgho, fonio.
Résistantes à la sécheresse, s’adaptant à des sols pauvres et arides, ces céréales sont très nutritives, fournissant des glucides, des protéines, des vitamines et des minéraux essentiels. Le fonio en particulier est reconnu pour sa haute teneur en acides aminés essentiels que le corps humain ne peut pas synthétiser. Elles peuvent être utilisées pour préparer de nombreux plats. Le mil et le sorgho peuvent être transformés en farine pour faire du pain, des galettes, ou des bouillies, ou des semoules tandis que le fonio est souvent utilisé comme céréale pour le petit déjeuner ou comme accompagnement, similaire au couscous ou au quinoa. Sans gluten, reconnues pour leurs qualités gustatives, elles sont une réponse aux intolérances.
Côté légumineuses, le niébé ou haricot cornille est une excellente source de protéines végétales, ce qui en fait un aliment idéal pour les végétariens, les végétaliens, ou simplement pour ceux qui souhaitent réduire leur consommation de viande. Il est également riche en fibres, en vitamines du groupe B, en fer, en magnésium et en potassium. Leur farine, cuisinée en beignets (Akaras, une recette venue du Nigéria, très populaire dans toute l’Afrique de l’ouest et au Brésil) en houmous, en couscous, comme dans le thiéré, le couscous sénégalais à base de mil permet une grande créativité dans l’assiette.
Tout comme le manioc, une racine riche en glucides, à l’origine de l’attieke, une semoule de manioc fermentée et cuite à la vapeur, recette traditionnelle de la Côte-d’ivoire.
Parce qu’elle met à l’honneur des ingrédients d’avenir dans un contexte de réchauffement climatique
Assez peu cultivées en France, leurs capacités du fonio et du sorgho à s’adapter au réchauffement climatique, ainsi que leurs qualités nutritionnelles en font des céréales intéressantes pour l’avenir. Au-delà d’offrir de la diversité dans les sources de protéines, elles permettent une rotation des cultures, grâce à leur résilience et leur capacité à pousser dans des sols pauvres.
Dans un contexte où les modèles agricoles français se cherchent, l’intégration des facteurs climatiques et d’évolution des comportements de consommation. Et nul doute que poussées par une demande grandissante, comme pour le quinoa (Quinoa d’Anjou), les pois chiches ou les lentilles ( Leggo) plus récemment, des filières de fonio, et de sorgho français vont voir le jour dans les années qui viennent.
D’ailleurs le sorgho, 5ème céréales dans le monde par exemple, cultivé par certains adhérents pionniers
Euralis depuis plusieurs décennies a vu son nombre de producteurs augmenter 43 % sur le dernier exercice, pour atteindre le chiffre global de 247 selon la coopérative.
Au périmètre mondial, 50% des surfaces sorgho se trouvent en Afrique, mais on le cultive aussi sur les 5 continents, et la France (Le Sud-Ouest : Lot et Garonne et en Haute Garonne en particulier) est le 2eme pays producteur d’Europe)
Parce que c’est une cuisine créative, métissée et plurielle
Quand je pense à la cuisine Africaine en France, un nom me vient immédiatement, celui de Mory Sacko. Si sa cuisine connait plusieurs influences, celle du Japon notamment, ses plats signatures revisitent avec talent le jus de bissap (boisson à base de fleurs d’hibiscus incontournable au Sénégal), avec des fleurs d’hibiscus blanc, des fèves tonka et du citron vert, ou encore le mafé (ragoût traditionnel à base de pâte d’arachide) dans sa recette : le bœuf à la sauce mafé. Il incarne à merveille cette cuisine qui connait ses racines, emprunte des influences pour écrire une carte unique.
Issu du monde de la gastronomie, il a étiré son univers à la street food et la comfort food, avec Mosugo, où les emprunts à l’Afrique sont nombreux : Jus de bissap et de gingembre, baies de selim, bananes plantain.
Amoureuse des beaux livres de cuisine, une autre chef Africaine m’a fait récemment voyager grâce à son livre « Mon Afrique » . Une très belle oeuvre de la Chef franco- gabonnaise Anto Cocagne : un livre de recettes, une rencontre et un voyage culinaire exceptionnel pour un dépaysement garanti.
2 adresses sont venues compléter mon « africain food tour » en France :
- Maison Soré, Rue de Marseille dans le 10ème arrondissement de Paris. A la fois cantine, Epicerie et traiteur, son univers soigné promet de belles découvertes gustatives
- Djaam fresh food : un concept imaginé par les fondateurs de Afrik n fusion, 3 restaurants dont 2 à Paris de bowls signature et à composer, chauds et froids, qui proposent une cuisine africaine revisitée, healthy, à base d’ingrédients bio.
Avec ses fatayas, ses rissoles, ses beignets, de plats faciles à assembler, ses jus de fruits du baobab, de gingembre, de bissap, de carassol, de tamarin ou de ditakh, la cuisine Africaine est une cuisine joyeuse, agile, saine ou réconfortante, toujours à partager.
Autant d’ingrédients qui vont lui permettre sans nul doute de prendre de la place dans nos assiettes dans les années qui viennent.
Parce que l’ouverture sur le monde nourrit l’imagination, et l’innovation.
Merci Corinne, un post inspirant sur la cuisine africaine, mais pas que... C'est aussi de notre alimentation de demain dont il s'agit : protéines issues de légumineuses, résilience climatique, faible empreinte écologique : la recette est là, et c'est délicieux !